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From bodily expression to mental relaxation, Ellande Jaureguiberry creates a dreamlike translation of physical exertion, using images as sensual as they are vibrant. An exhibition that leads to a spiritual and contemplative sport. By Rémi Guezodje

The first solo exhibition by artist Ellande Jaureguiberry (born in 1985), « Training and the Opposite » invites visitors to reflect on a seemingly alienating practice, yet one that is more widespread in contemporary morality. A dozen glazed stoneware sculptures, along with collages and pencil drawings, unfold the lexical and visual field of sports practice in pastel tones. In the 22.48m² gallery, visitors encounter orange-yellow dumbbells made of sugar, glass paste, and soap, jugs stacked on a pedestal flexing their muscular arms, and sketches multiplying perspectives on Aluangi bodies after exercise. Similarly, small colored ceramic tiles covering many works evoke Roman baths, the tiles found at the bottom of many swimming pools, and the geometry of Hockney’s paintings. These visual codes set the scene: the works mimic the tension between effort and release, between the strain imposed on the muscles during exercise and the sweet relief that follows.

The artist approaches exercise as a way to awaken the body to a wide range of sensations, a way of connecting it to what it ingests and what animates it. This is evidenced by Nature Morte au Pomelo (2023), a colored pencil collage on Montval paper depicting the energy provided by a lemon, symbolizing a pulp that is assimilated into the body through digestion, allowing one to do push-ups and run for miles, but also to access a form of reverie provoked by the endorphins secreted and depicted in the background of the composition. After the effort, comfort, one could quickly summarize. But not only that, since the effort finds in the reverie it generates a form of rest. Ellande Jaureguiberry thus seems to want to draw our attention to the temporal confusion that practicing sports necessarily entails. Pain mixes with pleasure, the inflexibility of one limb allows the flexibility of another, the ingested meal transforms into fuel, thoughts wander all the while counting the minutes separating us from the end of the workout.

Thus, the exhibition shines a spotlight on the materiality of thought—its muscles, on the flavor of the erotic imagination, and its caloric origins—literally evoked by perishable elements inserted into the sculptures and by sensual images integrated into the collages—and on the psychological effort that idleness demands. It’s a rethinking that helps us consider how sport can be a place of spiritual wandering once a certain level of pressure is reached. It’s also a way of evoking the idea that daydreaming is a muscular exercise in its own right, the result of the activation of neurons. The gentle effect of strolling amidst Ellande Jaureguiberry’s skillfully composed, elegant, and mischievous drawings leads us to believe that the practice and experience of art, like dreaming, love, or exercise, is a sport in its own right.

Fr

De l’expression du corps au relâchement de la pensée, Ellande Jaureguiberry met en œuvre une traduction onirique de l’effort physique, à coups d’images aussi sensuelles que vitaminées. Une exposition qui entraîne à un sport spirituel et contemplatif. Par Rémi Guezodje

Première exposition personnelle de l’artiste Ellande Jaureguiberry (né en 1985), “Training and the Opposite” propose au visiteur de se pencher sur une pratique apparemment aliénante et pourtant plus répandue dans les mœurs contemporaines. Une dizaine de sculptures en grès émaillé ainsi que des collages et dessins au crayon déploient le champ lexical et visuel de la pratique du sport dans des tons pastel. À la galerie 22,48m2, on croise des altères jaune orangé en sucre, pâte de verre et savon, des cruches empilées sur un piédestal bandant leurs bras musclés, ou encore des esquisses multipliant les perspectives sur des corps aluangis après l’effort. De même, tapissant de nombreuses œuvres, des petits carreaux de céramique colorés évoquent autant les thermes romains que le carrelage qu’on trouve au fond de nombreuses piscines, ou la géométrie des toiles de Hockney. Ces codes visuels plantent le décor : les œuvres imitent la tension entre effort et relâche, entre la contrainte imposée aux muscles au moment du sport et le doux soulagement qui la suit.

L’exercice sportif est abordé par l’artiste comme un moyen d’éveiller le corps à un large éventail de sensations, une manière de le relier à ce qu’il ingère et qui l’anime. En témoigne Nature Morte au Pomelo (2023), un collage au crayon de couleur sur papier Montval mettant en scène l’apport énergétique d’un citron, symbole d’une pulpe qui s’assimile au corps par digestion, permettant certes de faire des pompes et de courrir des kilomètres, mais aussi d’accéder à une forme de rêverie provoquée par les endorphines sécrétées et figurées en arrière-plan de la composition. Après l’effort, le réconfort, pourrait-on rapidement résumer. Mais pas seulement, puisque l’effort trouve dans la rêverie qu’il génère une forme de repos. Ellande Jaureguiberry semble alors vouloir attirer notre attention sur la confusion temporelle qu’implique nécessairement la pratique du sport. La douleur se mêle au plaisir, l’inflexibilité d’un membre permet la souplesse d’un autre, le repas ingurgité se transforme en carburant, la pensée divague tout en même temps que l’on compte les minutes nous séparant de la fin de l’entraînement.

Ainsi l’exposition braque-t-elle un coup de projecteur sur la matérialité de la pensée — ses muscles, sur la saveur de l’imaginaire érotique et ses origines caloriques — littéralement évoquées par des éléments périssables insérés dans les sculptures et par des images sensuelles intégrées dans les collages — et sur l’effort psychique que demande l’oisiveté. C’est une remise à plat aidant à penser comment le sport est un lieu de divagation spirituelle une fois un certain niveau de pression atteint. Aussi, une manière d’évoquer que la rêverie est un travail musculaire à part entière, fruit de la mise en mouvement des neurones. Le doux effet que procure la promenade au milieu des dessins savamment composés, élégants et malicieux d’Ellande Jaureguiberry nous mène à penser que la pratique, et l’expérience de l’art, au même titre que le rêve, l’amour ou l’exercice, serait un sport à part entière.

par Rémi Guezodje